Leçon de douarneniste #5
“Mieux vaut un petit konchennoù qu’un grand chez les autres”
Leçon de douarneniste du jour
Confinement quand tu nous tiens – Par Jean Pencalet
Ma chère Étiennette,
Les confinées parlent aux confinées !
C’est moi mignonne qui suis à vous écrire car vous me connaissez Nénette, je suis pas très dornée avec le téléphone ! La dernière fois, pour vous avoir, j’ai fait le tour de France avec des faux numéros ! Je suis même arrivée en Guadeloupe : une voix m’a dit alors : ici vous êtes à Marie Galante ; je lui ai fait : je connais pas cette Marie là… A moins que ce soit la Marie de Tréboul Goz qui a levé sa jambe longtemps !
De toutes les façons, je préfère les lettres, on peut dire plus de choses ! Et pour moi c’est facile, j’ai une boite pour poster sur le devant de ma maison…
Bon, j’espère que vous allez toujours bien malgré le confinement ?
Ce doit être dur pour vous : vous n’avez jamais été une femme d’intérieur ! Et comment vous faîtes pour vos courses seule comme vous êtes ? Moi j’ai ma supérette juste de l’autre côté de la rue ; je jette un œil et s’il y a personne je fonce ! Avant-hier il y avait tellement de tiz avec moi que j’ai tombé tout le long de mon corps j’ai rien cassé mais je suis blonsée de partout. Heureusement y’avait pas un chat dans la rue pour faire la moque de moi !
L’autre jour, j’ai eu un coup de téléphone de Nana qui me disait combien on avait la chance d’être près d’une boutique où on trouve de tout. D’après elle qui habite si loin d’un magasin ça a été la catastrophe : ils ont été deux jours sans porto pour elle et sans pinard pour le mari : un homme tenn comme il est !
C’est vrai que cela peut être dur une cohabitation de 24 heures sur 24 avec son bonhomme !
Vous, vous avez la chance, vous êtes veuve depuis longtemps. Moi je croyais que le mien sans
tours de port du matin et du soir aurait été plus que spontus entre mes jambes toute la journée ;
mais non, il est de l’heure dans son appentis à faire des maquettes de bateaux à ses petits-garçons.
Au fait vous avez su ou vous avez pas su que Marie-Rose avait ridé son parapluie et avec une belle
fin car elle s’est réveillée morte un matin ! Et tout le monde de faire rara, car elle, la catho de choc, la confinée en dévotion, n’a pas eu la grand’ messe qu’elle voulait pour partir ! Et pas de café d’enterrement alors que combien de fois on a été bouarré à l’entendre dire combien il aurait été plus que somptueux : elle se trouvait , pas ? Et celle-là était pleine de sous et de biens ; dans le derrière de qui cela va aller ? Là y’a que deux neveux qui peuvent pas se sentir : y’aura du reuz avec eux ; ceux – là vont se plumer !
Bon, sur ses bonnes paroles, je vous laisse ; la suite au prochain numéro ! Prenez soin de vous ;
n’allez pas frotter coco de personne avec ce maudit microbe !
Je vous bouche ( de par la poste on a le droit)
Marie-Jeanne
P.S : ce qui me dérange le plus dans le confinement c’est de ne pouvoir aller aux Plomarc’hs cueillir des rozamandes : c’est le printemps malgré tout.
Jean PENCALET – 07 Avril 2020
Illustration : Charles Kerivel